Au pays des vikings et des sagas     


« Ab furoris Normandorum libera nos, Domine »     De la fureur des Normands préserve nous, Seigneur …

Pendant près de 800 ans, cette prière aussi insolite qu’anachronique résonna dans les monastères de France. Il fallut attendre le siècle de Louis XIV pour que s’estompe dans ces communautés religieuses le souvenir des raids de ces "North Men", c'est à dire des vikings, qui n’avaient pourtant duré que quelques décennies, huit cents ans plus tôt !
C’est à travers la source quasi-exclusive des récits des religieux, qui furent effectivement victimes de leurs pillages à l’époque, que l’histoire populaire a bâti le mythe des vikings. Il faut admettre que ce mythe a eu la part belle, puisqu’il a servi de base à l’enseignement scolaire que nous avons reçu sur la question, ainsi qu’à toute une littérature et à quelques films à grand spectacle qui ont conforté et amplifié une vision un peu simpliste.
Ce n'est que récemment, à travers les travaux de quelques chercheurs notamment français comme Régis Boyer, qu'on a sérieusement étudié le phénomène viking et rendu à l'histoire sa part de vérité prise contre le mythe et la légende. On sait aujourd'hui que les vikings n'étaient pas plus barbares ni cruels que leurs contemporains d'autres régions d'Europe. Ils étaient avant tout des paysans libres, des artisans habiles, des commerçants avisés, et assurément de grands navigateurs avides d'étendre les limites de leur monde connu.

Par rapport à l'Islande, l'histoire des vikings est celle de la colonisation d'une terre quasi-vierge, et de l'établissement d'une civilisation originale et dynamique, aux structures socio-politiques uniques dans le monde de cette époque.

Vaguement citée depuis l'époque romaine, l'Islande ("Ultima Thule"), trop isolée dans l'Atlantique Nord, était resté une "Terra incognita".

Au VIIIème siècle, seuls quelques moines irlandais s'y étaient établis de manière précaire pour y mener une vie d'ascèse et de méditation.

Ce sont les vikings, dont l'arrivée est traditionnellement datée de 874, qui furent en fait les premiers colons de l'île.
Deux sagas célèbres entre toutes, le Landnámabók (le Livre de la colonisation) et l'Íslendigabók (le Livre des islandais) relatent les débuts de la période viking en Islande et l'installation des premiers colons.
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Carte de Philip Galle, Anvers, 1577
Ces colons étaient des norvégiens. Pour la plupart, des chefs de clans qui avaient refusé de se soumettre à la tyrannie du roi Harald à la Belle Chevelure. Certains d'entre eux étaient bannis de Norvège pour rébellion.
Déjà habitués aux expéditions lointaines, ils ont alors convaincu une partie de leurs proches de s'embarquer pour une terre nouvelle, quelque part vers le Nord-Ouest.
Depuis le début du 9ème siècle, des norvégiens y avaient déjà fait quelques reconnaissances. C'est ainsi que l'île avait été baptisée "Ís land", Terre de glace, par Flóki Vilgerðarson, un pionnier qui avait tenté, en vain, de s'établir dans la région des fjords du Nord-Ouest qu'il trouva gelés en hiver.

Le Landnámabók raconte l'arrivée du premier colon "officiel" : Ingólfur Arnarson, en 874. Ingólfur est aujourd'hui un héros national, reconnu comme le fondateur du pays. C'est à Ingólfshöfði, une île ensablée de la côte Sud, qu'il débarqua. Une stèle de pierre y commémore l'événement.
Il reprit ensuite la mer et s'établit définitivement dans la région de Reykjavík, "la baie des fumerolles", qu'il nomma ainsi en raison des sources chaudes et des solfatares qui dégageaient des volutes de vapeur visibles de la mer.
Sur l'île ensablée d'Ingólfshöfði, la  stèle commémorant le débarquement d'Ingólfur
La colonisation de l’Islande par les vikings fut très rapide. De 874 à 930, les vagues d’immigrants norvégiens, accompagnés d’esclaves celtes, s’établirent un peu partout sur les côtes, notamment dans le Sud, le Sud-Ouest et la péninsule du Snæfellsnes.

Vers 930, la population de l’île était de 25000 personnes, et la majeure partie des terres utilisables avait été mise en valeur.
On sait qu'à cette époque, le climat de l'Islande était sensiblement plus doux qu'aujourd'hui. Les zones de prairies étaient plus étendues et dans les secteurs abrités il y avait des forêts.
Les vikings ont vite mis en place une organisation sociale et politique originale, avec des clans composés d’hommes libres, les boendr (au singulier bóndi), paysans propriétaires de leurs terres. Ils possédaient des esclaves celtes qui pouvaient être affranchis après avoir bien servi leur maître. Dès le début de la colonisation, les chefs de clan ont refusé toute idée de pouvoir central.
Le territoire était partagé entre une quarantaine de communautés territoriales, souvent organisées autour d’une famille ou d’un clan et ayant chacune un goði, à la fois chef spirituel et temporel. Les hommes libres se réunissaient en assemblées locales, les þing qui fixaient les règles de droit et rendaient la justice.
En 930, les chefs locaux fondèrent un « þing » fédéral, l’alþing, compétent pour l’ensemble du pays et qui est en fait le premier parlement du monde.
L’alþing se réunissait chaque année pendant deux semaines au moment du solstice d’été, quand il n’y a pas de nuits, dans la plaine de Þingvellir, au Nord-Est de Reykjavík.
L’assemblée des chefs locaux se tenait en plein air, dans l’almannagjá ("la gorge de tous les hommes"), une faille tectonique qui est une partie visible du rift medio atlantique.
Un lögsögumaður, l’homme qui récite la loi, élu pour trois ans, énonçait les lois et les règles qui régissaient le fonctionnement de la société. Certaines de ces lois étaient discutées, amendées, puis reformulées, et chaque chef local était chargé de les mettre en application dans sa province.
Þingvellir : l’Almannagjá
Le dieu Thor (Þórr) La loi était véritablement sacrée pour les vikings, elle était la valeur fondamentale des hommes libres et la base même de la religion.

C’est ainsi que l’Islande fut gouvernée à l’époque viking, pendant plus de quatre siècles, jusqu’à ce qu’elle passe sous le joug de la Norvège, puis du Danemark en 1380.

En France, au Moyen-âge, les chroniqueurs qui évoquaient les terres lointaines des vikings islandais savaient peu de choses de ce pays, mais ils disaient fort justement : « Là bas il n’est point de roi, seulement la Loi ».


La vie quotidienne des vikings était celle de fermiers-éleveurs-pêcheurs. Les fermes étaient établies dans les régions côtières et quelques vallées fertiles proches des côtes, comme la vallée de Reykhólt.

La ferme viking, appelée langhús (longue maison), était construite en mottes de tourbe entrecroisées, sur un soubassement de pierres. Elle avait une charpente en bois et un toit couvert d’herbe.
Le plus souvent, un long bâtiment regroupait un ensemble de pièces et de dépendances.
On sait que certaines fermes utilisaient déjà la chaleur de sources géothermiques pour le chauffage et la toilette.



Dans la þjórsárdalur, la vallée qui s’étend au pied du volcan Hekla, on a découvert les vestiges de la ferme viking de Stöng, qui fut détruite en 1104 par une éruption.

Stöng était la ferme de Gaukur Trandilsson, un paysan-guerrier qui est cité dans la Saga de Njáll le Brûlé.

Une reconstitution parfaite, þjödveldisbær, que vous voyez ci-contre et au-dessus, a été construite à quelques kilomètres de là.
La ferme est magnifique, avec ses murs de plus d'un mètre d'épaisseur, faits de mottes de tourbe soigneusement agencées, et ses longs toits couverts d’herbe verte.
Sur la droite, on peut voir les dépendances qui servaient pour les sanitaires et la laiterie.
Grâce aux pouvoirs isolants de la tourbe, ces fermes étaient remarquablement adaptées au climat islandais.
La ferme viking de þjödveldisbær

La ferme viking de þjödveldisbær
Mais les vikings n'étaient pas que des fermiers-éleveurs. Certains d'entre-eux, parfois les mêmes, étaient aussi d'extraordinaires navigateurs, d'habiles commerçants et, au gré des opportunités, de redoutables pillards.

Bien que peu nombreux, ils ont emprunté les routes maritimes de l'Ouest, vers les îles Féroé, l'Angleterre, l'Irlande, les côtes occidentales d'Europe. Ils ont remonté la plupart des fleuves européens, ils sont descendus au Sud par l'Allemagne vers l'Italie du Nord. D'autres ont emprunté les routes de l'Est, par la Russie et l'Ukraine, puis jusqu'à Byzance par les fleuves russes, la mer Noire et la Caspienne. D'autres ont parcouru les routes maritimes du Nord, les côtes de la mer Baltique et de la mer Blanche. D'autres enfin, à partir de l'Islande, ont colonisé le Groenland et sont arrivés jusqu'en Amérique du Nord (voir ci-après).
Ils ont parcouru les océans les plus dangereux, réalisant des performances qui étonnent les marins d'aujourd'hui. Ils utilisaient des tables de déclinaisons permettant de faire le point à partir de la hauteur du soleil. Certaines sagas parlent de l'utilisation d'un cristal naturel, la "pierre solaire" (la cordiérite ?) qui diffracte la lumière solaire même dans la brume et vire du jaune au bleu quand il est perpendiculaire au plan de la lumière solaire.
Mais ce sont surtout les qualités des navires vikings qui ont été un facteur décisif.
Ces bateaux n'étaient pas des "drakkar" comme on nous l'a appris à l'école. Il vaut mieux éviter ce terme qui est une invention contemporaine basée sur le mot dragon, car les bateaux vikings avaient souvent une figure de proue en forme de tête d'animal fantastique. En fait, ces sculptures étaient destinées à protéger les navigateurs contre les esprits malveillants qu'ils craignaient de rencontrer sur la mer, et à impressionner les esprits tutélaires des pays visités. Ni les vikings, ni leurs contemporains n'ont appelé ces bateaux des "drakkars". Il vaut donc mieux employer les termes de langskip et de knörr, que les vikings eux-mêmes employaient pour désigner leurs bateaux.
Tapisserie de Bayeux
Tapisserie de Bayeux (Normandie, France)
Grâce à la rapidité et à la bonne tenue à la mer de ces navires, les vikings rapportaient chez eux de nombreuses richesses, fruits de leur commerce ou de leurs pillages. Plusieurs types de navires coexistaient et étaient complémentaires. On les voit bien sur cette fantastique bande dessinée du Moyen-âge qu'est la tapisserie de Bayeux.
Le langskip (long navire) était le navire d'expédition et de guerre des Vikings. Il mesurait entre 15 et 25 mètres de long et 2,5 m de large, et était armé par un équipage de 25 à 30 rameurs-guerriers.
C'était l'embarcation idéale pour opérer en eaux peu profondes sur les côtes et pour s'aventurer dans les terres en remontant les rivières.

Les navires vikings étaient construits "à clins" (planches épaisses à recouvrement rivetées entre-elles). Cette technique de construction navale leur conférait à la fois souplesse et résistance.
Le langskip était propulsé soit par des rameurs (une rangée d'avirons sur chaque côté), soit par une voile rectangulaire en toile de laine.
Le gouvernail était constitué d'un aviron spécial, fixé du côté droit à l'arrière du navire. Les vikings appelaient le gouvernail styri, et le côté où il était fixé portait le nom de styrabord, d'où provient le mot anglais starboard qui désigne le tribord ou le côté droit d'un navire.)



Langskip

Ci-dessus, une magnifique reconstitution de langskip,
près de la maison ancienne de Stekkarkot
à Njarðvík (péninsule de Reykjanes).
Le knörr était le bateau de commerce, conçu pour transporter une cargaison importante.
Sa coque était plus courte, plus large et plus massive que celle des langskip. Il était propulsé par une voile carrée et un équipage de quatre ou six rameurs en cas de besoin.

Le knörr est le type de bateau que les colons ont utilisé pour coloniser l’Islande à partir de la Norvège, puis pour traverser l'Atlantique Nord jusqu'au Groenland et en Amérique.
Knörr
Parmi les nombreuses Sagas islandaises, la "Saga de la colonisation", la "Saga d'Erik le Rouge" et la "Saga des Groenlandais" racontent les expéditions des colons vikings vers d'autres terres à partir de l'Islande. On y trouve en particulier les récits des découvertes d'Eric le Rouge (Eiríkur rauði en islandais) puis de son fils Leif le Chanceux (Leifur Eiríksson)

Eiríkur Þordvaldsson, surnommé "rauði ("le rouge") en raison de la couleur de sa chevelure, était le fils de Þorvaldur Ásvaldsson, un colon venu de Norvège après y avoir été accusé de meurtre et condamné au bannissement.

Dès l'adolescence, le jeune Eiríkur était connu pour sa force et son courage, mais aussi pour son tempérament violent.
A la mort de son père, il s'établit dans la belle vallée de Haukadalur (Nord-Est de la péninsule du Snæfellsnes, près de Budardalur) où il bâtit sa ferme et épousa Þjóðhildur Jörundardóttir avec laquelle il eut deux enfants, Leifur et Þorsteinn.

Ci-contre, vous pouvez voir la ferme d'Eric le Rouge (Eiríksstaðir), telle que nous l'avons visitée en juin 2005. Elle a été reconstituée d'après les indications des archéologues, à quelques dizaines de mètres de l'endroit se trouvent les ruines de la ferme d'origine.

A la suite d'une querelle de voisinage, Eiríkur commit un meurtre et dût quitter la vallée. Il s'établit alors à Öxney, une île du Breidafjörður située à l'Est de Stykkishólmur. Mais de nouvelles querelles et un nouveau meurtre lui valurent cette fois le bannissement d'Islande pour trois ans, prononcé par le Þing (parlement) local.

Eiríkur avait entendu évoquer les récits de navigateurs vikings qui disaient avoir aperçu des terres au Nord-Ouest de l'Islande. En 982, il mit le cap dans cette direction et découvrit le Groenland. Il explora la côte Sud-Est qu'il trouva trop inhospitalière, puis la pointe Sud et découvrit juste au Sud-Ouest une zone où les glaciers étaient relativement reculés par rapport à la côte.
Il s'établit à Brattahlid ("pente raide"), non loin de la ville actuelle de Narsarsuaq, au fond d'un long fjord qui porte à présent le nom d'Eiríksfjörður.

On sait aujourd'hui que le climat de l’époque était plus doux que de nos jours. Eiríkur nomma sa nouvelle terre «Grön land», littéralement "le pays vert".

On pense cependant qu'il n'était pas dupe, ni tout à fait objectif ... Dans la "Saga des Groenlandais", le narrateur rapporte ses propres paroles : « Eiríkur se dit que beaucoup de gens voudraient certainement le suivre vers une nouvelle terre qui portait un si beau nom ! »


Eiríksstaðir dans la vallée de Haukadalur



A l'intérieur de la ferme d'Eric le Rouge, on fait cuire des galettes de blé sur un feu de tourbe, en compagnie d'étudiants en archéologie qui font visiter le site

Trois ans plus tard, son bannissement prenant fin, il revint en Islande dans sa région d'origine, le Breidafjörður. Mais il était sans doute encore indésirable car sa saga raconte qu'il dissimula ses bateaux dans l'Álftafjörður, un petit fjord désert (il l'est encore aujourd'hui) à l'Est de Stykkishólmur, et commença, dans la clandestinité, à recruter des familles et des clans de volontaires pour le suivre au Groenland dont il disait que c’était un vrai paradis.
Sa force de persuasion (mais aussi la disette qui sévissait dans la région) lui permirent en quelques mois de rassembler de nombreuses familles volontaires pour le suivre vers sa terre promise, sa "Grön land" ...

En 985, ce sont ainsi plus de 500 personnes, hommes, femmes et enfants, qui se sont embarqués sur vingt-cinq knörrs lourdement chargés de vivres, d’animaux et de matériel. Mais l'expédition joua de malchance : une effroyable tempête transforma la traversée en catastrophe. Seuls quatorze navires atteignirent le Groenland.

La petite colonie viking s'établit autour de Brattahlid, sur des versants abrités dominant de vastes herbages. Ces vikings groenlandais étaient essentiellement des éleveurs, avec un cheptel abondant de vaches et de moutons.

Pendant deux siècles environ, la communauté essaima en de nombreux points de la côte Sud-Ouest du Groenland, elle se développa progressivement jusqu'à atteindre 3000 personnes, puis certains établissements périclitèrent et furent progressivement abandonnés.
Le refroidissement du climat ainsi que les maladies rendaient la vie de plus en plus difficile. Les restes de la colonie parvinrent à se maintenir jusque vers 1450 où, le climat s'étant sérieusement refroidi, elle disparut totalement, remplacée par les Inuit dont le mode de vie était mieux adapté au froid car ils tiraient exclusivement leurs ressources alimentaires des phoques et du poisson.
A partir du Groenland, vers l'an 1000, le fils d'Eric le rouge, Leif Eiríkson dit "le chanceux", organisa une nouvelle expédition vers l'Ouest.
Ils remontèrent d'abord la côte Ouest du Groenland puis franchirent le détroit de Davis et abordèrent le continent Nord-américain par la Terre de Baffin qu'ils nommèrent Helluland ("le pays des pierres plates"), puis ils descendirent vers le sud et trouvèrent une région forestière qui les émerveilla, car il n'y avait pas d'arbres au Groenland. C'était la côte du Labrador qu'ils appelèrent Markland ("le pays des forêts").
Encore plus au Sud, ils passèrent l'hiver sur une côte où le climat leur parut particulièrement doux (c'était sans doute tout relatif par rapport à l'hiver groenlandais …). Ils nommèrent ce pays Vìnland, terme qui a été souvent interprêté un peu hâtivement par "pays de la vigne". En fait, la syllabe "vin" a sans doute été mal transcrite. Il s'agirait en réalité de "Vìnland" où le " ì " accentué change complètement la signification du mot. "vin" signifiant vigne et "vìn", pâturage.
On pense que ce "pays des pâturages" est une baie aujourd'hui nommée "l'Anse aux Meadows", à la pointe Nord de Terre-Neuve, où se trouvent les seuls pâturages de la région. De fait, les archéologues canadiens y ont trouvé les traces certaines d'une colonie viking, des ruines d'habitations présentant les mêmes caractéristiques que celles d'Islande et du Groenland, des objets usuels, etc ...
Les explorations vikings autour de l'an mille à partir de l'Islande
Leif Eiríkson avait ouvert la voie vers l'Amérique.

Les expéditions vikings à partir du Groenland vers ces "nouvelles terres"
(Terre Neuve) se sont poursuivies pendant les années suivantes.


Fibule viking
Statue de Leif Eriksson, devant la cathédrale de Reykjavík
Þorvaldur, l'un des fils de Leif, tenta de s'établir au Vìnland quelques années plus tard mais il fut tué par les indigènes.

L'année suivante, son frère Þorsteinn voulut lui aussi suivre les traces de son père. A partir du Groenland, il prit la mer pour fonder une colonie au Vìnland avec sa jeune femme Guðríður, mais Þorsteinn mourut en voyage.

Guðríður Þorbjarnardóttir était originaire de la ferme de Laugarbrekka, près de Hellnar dans la péninsule de Snæfellsnes.

Vous pouvez voir ci-contre, au pied du volcan Snæfell enneigé, les ruines de sa ferme (où nous sommes passés en mars 2006).

Un destin exceptionnel attendait Guðríður. Revenue au Groenland, elle se remaria avec un noble et puissant marchand du nom de Þorfinnur Karlsefni et repartit avec lui vers le nouveau monde. Ils s'installèrent avec une petite communauté dans le camp que Leif avait bâti quelques années auparavant. Ils y passèrent trois ans et Guðríður y mit au monde un enfant nommé Snorri, premier européen né en Amérique.

Mais, harcelés par les indigènes, les colons groenlandais ne purent se maintenir au Vìnland. Þorfinnur et Guðríður revinrent au Groenland puis de là en Norvège et enfin en Islande où ils s'installèrent à la ferme de Glaumbaer dans le Skagafjörður (Nord de l'Islande). Devenue veuve pour la seconde fois, Guðríður Þorbjarnardóttir qui était chrétienne partit en pélerinage à Rome, puis elle revint à Glaumbaer où elle finit sa vie comme nonne.
Cette femme au destin hors du commun fait partie des grandes héroïnes des Sagas. Sa force de caractère et sa grande indépendance d'esprit font qu'elle représente une référence historique majeure pour les islandais, et en particulier pour les islandaises qui voient en elle les prémisses de la femme moderne. Sur le plan purement historique, Guðríður Þorbjarnardóttir est sans doute la femme ayant le plus voyagé dans le monde à son époque.
Mais les tentatives d'installation de ces pionniers vikings fut contrariée par l'hostilité des autochtones qu'ils appelaient les "skrælinger" ("les rabougris") en raison de leur petite taille. On pense que ce n'est pas à proprement parler la supériorité guerrière de ces indigènes qui ait été décisive, mais plutôt leurs pratiques magiques qui auraient dérouté et effrayé les vikings.
L'épisode de "la boule noire", relaté dans les sagas, est à cet égard assez significatif : alors que les vikings étaient retranchés dans leur camp entouré de palissades de bois, les "skrælinger" ont fait passer par dessus le rempart, à l'aide d'une grande perche, une étrange "boule noire" qu'ils ont lachée et qui est tombée dans le campement en faisant une sorte d'explosion et en éclaboussant tout ... (on pense qu'il devait s'agir d'une outre ou d'une grande vessie d'animal, remplie d'un colorant noir naturel et d'autres vessies plus petites remplies d'air). La chûte de cet objet insolite (et pourtant totalement inoffensif), l'explosion et les éclaboussures noires ont, semble t-il, littéralement épouvanté les vikings et leur ont porté un énorme coup au moral ... C'est sans doute avec des épisodes de ce genre que le harcèlement des indigènes du Vínland a fini par porter ses fruits.

Les vikings ont poursuivi leurs explorations et leurs tentatives d'établissement sur la côte Nord-américaine jusqu'au 13ème siècle, puis ces expéditions ne survécurent que dans les récits des navigateurs et dans la mémoire collective de leurs descendants, dont certains étaient revenus s'établir en Islande.
Certains pensent que Christophe Colomb a eu connaissance de ces récits, à partir desquels il aurait échafaudé son projet de "(re)-découverte de l'Amérique".



En effet, son fils Fernando Colomb rapporte dans un texte du début du 16ème siècle, que son père avait fait en 1477 un "voyage à Thulé" (c'est ainsi qu'on appelait l'Islande dans le monde latin) comme membre d'équipage à bord d'un navire de commerce anglais. Le récit est suffisamment précis pour qu'on sache même qu'il avait été hébergé à la ferme-église aujourd'hui abandonnée d'Ingjaldshóll, près de Rif, sur la côte Nord-Ouest de la péninsule de Snæfellsnes.
Le mont Kirkjufell, près de Rif (côte Nord Snaefellsnes)





Lire et découvrir :

Nous avons choisi pour vous, ici :
quelques paroles de sagesse des vikings




Affiche expo Sur les traces des vikings
  • "Sur les traces des vikings" : le musée de la tapisserie de Bayeux (Calvados) organise du 13 janvier au 2 mai 2007 une exposition présentant des découvertes archéologiques scandinaves et normandes.
    Musée de la Tapisserie de Bayeux. Centre Guillaume le Conquérant. 13 bis rue de Nesmond. 14402 Bayeux.


Pour en savoir plus (bibliographie) :
  • Les vikings. 800-1050. Régis Boyer. Collection La vie quotidienne. Hachette Littératures. 2003


  • Les vikings. Régis Boyer. Collection Idées reçues. Editions Le Cavalier bleu. 2002


  • Une citation de Régis Boyer sur les Vikings.
Pour en savoir plus sur le web ...

Il existe de nombreux sites sur les vikings. Malheureusement, bon nombre d'entre eux ne font que colporter les idées reçues, souvent déformées ou carrément fausses sur le sujet.

A notre avis, une information (en langue anglaise) à la fois simple d'accès et sérieuse dans son contenu peut être trouvée dans le site "Viking Network" (Norvège)




    


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